Achille Jacquinot (1798 - 1865), fils d'Etienne Jacquinot, lui-même banquier, a fondé sa propre maison de banque en 1836. Il avait été auparavant associé à son père et était depuis 1827 agent à Nevers de la compagnie d'assurances " Le Phénix ", activité qu'il poursuivra parallèlement.

En 1862, il associe dans la société en nom collectif " Achille Jacquinot et compagnie " ses deux gendres, Léon Malleval (1821 - 1887, capitaine d'artillerie de marine, ancien Polytechnicien) et Anatole Bricheteau (1827 - 1898, fils de médecin). Après sa mort en octobre 1865, la société est continuée entre sa veuve et les deux gendres, puis réduite à la veuve et Malleval en décembre 1871 après le retrait de Bricheteau, qui fonde sa propre maison. Les annotations de Malleval sur des fiches de renseignements ou des dossiers clients traduisent une mésentente certaine entre les beaux-frères, du temps de leur condominium. Malleval note même qu'il " pensait ne pas continuer la maison de banque ". Malleval dirige l'établissement, devenu " Léon Malleval " au décès de la veuve Jacquinot en 1884, jusqu'à sa mort en 1887. Il semble que son gendre Georges Poncelin, père de sa petite-fille et seule héritière Laure (1875 - 1953), n'ait pas souhaité reprendre la banque et celle-ci a été liquidée par la veuve Malleval et son fondé de pouvoir Puissant en 1887 - 1888 (pour l'essentiel : les dernières pièces datent de 1896).

La banque Jacquinot pratiquait principalement l'escompte de papier commercial, le dépôt et le prêt, généralement garanti sur hypothèque. Sans audace excessive et avec une certaine attention portée aux recouvrements et aux remboursements (voir la correspondance et les dossiers clients), elle a développé son volume d'affaires pendant une grande partie de la période, profitant de l'expansion économique locale sous la Monarchie de Juillet (agriculture surtout), de l'impulsion générale donnée par le Comptoir d'Escompte de Nevers à partir de 1848& et de la chute dudit Comptoir en 1864. Les affaires se sont progressivement restreintes dans les années 1880, suite à l'importance prise par les succursales des grandes banques (Société Générale et Crédit Lyonnais surtout, contre lequel Malleval voudrait organiser la " résistance " en 1882, voir une note en dossiers clients). A la mort de Malleval, la situation n'était pas désespérée, mais probablement moins attrayante pour un successeur qu'elle ne l'était vingt ans auparavant.

Par ailleurs, aussi bien Achille Jacquinot que Léon Malleval ont été mêlés à la vie de la cité et se sont montrés actifs en-dehors du domaine bancaire stricto sensu. Achille Jacquinot a été conseiller municipal de Nevers, conseiller général, juge ou président du tribunal de commerce, où il est maintes fois élu à partir de 1833, et récolta une voix à l'élection présidentielle de décembre 1848. Léon Malleval s'est plus particulièrement investi dans ses fonctions au tribunal de commerce : les classeurs où il rangeait ses notes préparatoires entre 1865 et 1880 ne devraient pas manquer d'intérêt pour la recherche en histoire économique ; à noter entre autres un gros dossier sur l'affaire du Comptoir d'Escompte, jugée par lui. En outre, les deux dirigeants se sont lancés dans d'autres opérations : adjudications de services ou de fournitures à l'armée des années 1840 aux années 1870, commerce de bois à partir de 1879 et même exploitation d'une carrière en 1886, tout ceci en restant dans le cadre de la raison sociale bancaire, souvent par le biais d'une faillite (le commissionnaire Dieudonné pour les convois militaires) ou d'une créance (Fayot pour le bois et la carrière). Le soin apporté par Malleval à ces deux dernières activités laisse penser qu'il envisageait, sinon une reconversion, du moins une diversification.

Les archives de la banque Jacquinot ont été conservées dans la cave de la maison familiale jusqu' en 1950 - 1951, puis données aux Archives Départementales. Les conditions précédentes de conservation ont rendu nombre de documents inutilisables (registres moisis ou collés, encre effacée par l'humidité, lettres en miettes) et des éliminations ont dû être opérées, particulièrement dans la correspondance. De manière générale, en raison de l'intérêt d'un tel fonds, n'ont été éliminés que des documents échantillonnables (brouillards et mains courantes, dont les opérations sont reportées sur les livres) ou inutilisables ; encore a-t-on conservé tout ce qui se rapportait aux activités annexes de la banque, malgré un état de fragilité qui devra inciter le lecteur à une manipulation prudente.

Les archives de la banque Jacquinot ont été données aux Archives Départementales par M. Guy Blandin, descendant de la famille, en 1950 - 1951 et ont fait l'objet d'un premier récolement en 1953 - 1954.

Don

Le fonds regroupe les archives proprement bancaires des trois sociétés successives : Achille Jacquinot, Achille Jacquinot et compagnie et Léon Malleval, les archives des différentes activités économiques exercées soit en nom propre (assurances), soit sous la raison sociale de la banque (adjudications de fournitures à l'armée et aux manufactures de tabac, vente de bois, exploitation d'une carrière) et les archives à caractère plus personnel (activités politiques et associatives, gestion des propriétés familiales, correspondance privée) des deux dirigeants et de leur proche descendance.

Ce fonds a été classé selon l'ordre suivant :

- Direction générale. Le lecteur y trouvera la documentation de la banque (peu de choses), les archives personnelles de Jacquinot et Malleval, la correspondance reçue et envoyée et quelques pièces justificatives relatives aux frais généraux. La correspondance reçue antérieure à 1866, non reliée ni numérotée, parvenue dans un certain état de confusion, a été examinée pièce à pièce et reclassée par année, ce qui a permis de repérer et d'extraire ce qui sortait de la correspondance bancaire ordinaire : Jacquinot semble n'avoir pas fait de distinction, rangeant simplement à l'initiale du correspondant ; les lettres présentant un caractère " mixte " ont été laissées dans cette rubrique.

- Clients et opérations bancaires. Les renseignements recueillis sur les clients et la constitution de dossiers nominatifs avaient généralement pour objet un crédit demandé et suivi. L'importance matérielle du dossier est souvent liée aux éventuelles difficultés de recouvrement de la créance. Les dossiers tenus par Malleval sont fréquemment pourvus de notes faisant l'historique de l'affaire, ce qui pourra être utile au chercheur ; en outre, les regroupements de dossiers faits à l'époque sous un intitulé commun ont été préservés et sont signalés par un titre entre guillemets. Le lecteur trouvera un index des noms de personnes et d'organismes à la suite du répertoire.

- Opérations financières. Le faible volume des documents relatifs au placement et à la négociation des valeurs cotées en Bourse est en rapport avec la faible importance de cette activité chez Jacquinot et ses successeurs.

- Comptabilité : très importante en volume et relativement complète, à l'exception des derniers volumes de comptes courants. A noter que pour l'ensemble du fonds, ce sont souvent les documents les plus récents (années 1880) qui ont le plus souffert de l'humidité.

- Personnel : deux pièces en tout et pour tout, de plus extraites du courrier ordinaire au moment du classement. Il ne semble pas que des dossiers de personnel aient été constitués à l'époque.

- Autres activités. Elles ont été classées selon le même plan que l'activité principale et également indexées : correspondance, dossiers clients et fournisseurs, comptabilité, personnel. Ces activités sont les suivantes : assurances, convois civils et militaires, chauffage et éclairage militaires, exploitation et vente de bois, exploitation d'une carrière (dans l'Aisne), opération immobilière à Diennes-Aubigny. Ces activités s'étendaient sur un rayon d'action souvent fort large : plusieurs régions militaires (successivement ou simultanément) ou la totalité des manufactures de tabac de France. En s'occupant de ces affaires, spécialement les bois et la carrière, Malleval a préparé des dossiers sur le transport des produits (route, eau, fer), et leur exploitation. Les dossiers de la carrière particulièrement, soigneusement documentés et enrichis de dessins techniques, font ressortir l'ingénieur de formation. Lequel ingénieur, banquier ou juge, agrémentait parfois les registres, les balances ou les dossiers clients de dessins, voire de caricatures...

Eliminations : mains courantes 1838 - 1887 (20 % des mains courantes ont été conservées en échantillonnage), plusieurs liasses et classeurs de correspondance reçue 1860 - 1883 (lettres déchiquetées et illisibles), 201 copies de lettres 1853 - 1885 (encre délavée par l'humidité, illisible). Total : 8,80 ml.

Le fonds a été inventorié selon les principes de classement méthodique proposés par les Archives nationales pour les archives d'entreprise.

Le donateur n'a pas fixé de conditions. Au regard des textes réglementant l'accès aux archives publiques, tous les documents de ce fonds peuvent être communiqués.

Le donateur n'a pas fixé de conditions. La reproduction par photocopie est autorisée pour les documents non reliés, si leur état le permet. Dans le cas contraire (registres et documents fragiles), le recours à la photographie sera possible.

- séries 3 E (archives notariales) et 3 Q (enregistrement) pour les évolutions de statut de la société : 3 Q 19 / 559 (15 janvier 1862), 3 E 27 / 72 (3 et 11 novembre 1865, 26 novembre 1871, 20 février 1872), 3 E 27 / 88 (4 et 5 août 1866), 3 E 27 / 166 (19 et 22 janvier 1872) ;

- série 4 E (état civil) sur Nevers et Varennes-lès-Nevers ;

- séries M et 6 U pour la carrière politique d'Achille Jacquinot et les élections au tribunal de commerce d'Achille Jacquinot et Léon Malleval ;

- archives privées 48 J : fonds du Comptoir d'Escompte de Nevers.

THUILLIER (Guy).- Aspects de l'économie nivernaise au XIXè siècle.- Paris : Armand Colin, 1966.- (chapitres sur les banques et les assurances).

STAINMESSE (Bernard).- Achille Jacquinot.- Les Patrons du Second Empire : Bourgogne, sous la dir. de Philippe Jobert.- Paris : Picard, 1991.

STAINMESSE (Bernard).- Alexis Frébault.- Les Patrons du Second Empire : Bourgogne, sous la dir. de Philippe Jobert.- Paris : Picard, 1991.

VALTAT (Maurice).- La Seconde République dans la Nièvre 1848-1852.- Nevers, Archives Départementales de la Nièvre, 1992.- Dossier documentaire. N° 6.